« Le silence n’a de signification que là où il pourrait y avoir du bruit. »
Béla Balázs

Cette exposition est conçue à la manière d’une conversation qui solliciterait votre attention auditive, même si la majorité des propositions rassemblées dans ce nouveau tableau de la collection s’avèrent invisibles à l’oreille, mais audibles au regard. La présentation rassemble des œuvres réalisées par Yves Gaucher, Pascal Grandmaison, Barbara Steinman et Takis, qui accordent une place manifeste aux registres optique et haptique du verbe « écouter ».

Au seuil de la salle, un diptyque photographique de Barbara Steinman nous accueille : deux paumes ouvertes pointent le rôle du corps comme vecteur d’une réflexion transcendant le monde intérieur et l’espace environnant. En réinscrivant ainsi l’image de la main au cœur du processus d’écoute, l’œuvre réinsuffle une part de sacré dans la symbolique de cette représentation. Cette même salle est rythmée par l’ensemble photographique Manner, réalisé par Pascal Grandmaison. Cette série montre des peaux de tambour marquées par l’usure et les battements répétitifs. Vestiges silencieux figurant l’effort exigé par la performance musicale, ces images se dévoilent comme le portrait abstrait d’un percussionniste.

La recherche plastique, chez Yves Gaucher, nous transporte vers des espaces de silence qui ne sont pas des espaces de contemplation, mais font partie de sa grammaire singulière constituée de rythmes visuels — lignes, couleurs, espaces et silences. L’artiste réalise la gravure intitulée Sono après l’expérience marquante des œuvres du compositeur et chef d’orchestre autrichien Anton Webern. Chargée de l’affect logé dans la mémoire auditive de Gaucher, elle démontre son intérêt pour l’œuvre du compositeur qui lui révéla une nouvelle manière de travailler. Cherchant à matérialiser la présence de l’énergie invisible au travers de l’objet audible, Takis développe une œuvre cinétique et électroacoustique qui explore les possibilités du magnétisme et de l’électromagnétisme. L’emploi de l’aimant et de l’électroaimant rend manifeste l’énergie naturelle des matériaux.

Considérant le rythme comme une propriété essentielle de la forme, considérant le bruit, tout comme le silence, comme appartenant à l’espace, cette exposition est un geste qui vise le questionnement de ces territoires.


Tableau(x) d’une exposition est un cycle d’expositions évolutif développé à partir des œuvres de la collection, dont l’objectif est de créer des dialogues inédits entre les œuvres historiques et les nouvelles acquisitions, entre les nombreux médiums et les artistes de diverses générations.


Le Musée d’art contemporain de Montréal remercie le ministère de la Culture et des Communications du Québec pour une subvention obtenue dans le cadre du Programme de soutien aux expositions permanentes permettant la réalisation de ce projet.

Commissarié par : Marie-Eve Beaupré, conservatrice de la collection