Acquisitions du Symposium des collectionneurs
Au cours des dernières années, le Symposium des collectionneurs Banque Nationale Gestion privée 1859 a permis l’acquisition d’œuvres importantes pour la collection du Musée. Événement fort prisé des collectionneurs et des amateurs d’art, cette soirée unique permet également aux non-initiés de découvrir l’art actuel et la pertinence de sa présence dans une collection muséale. Découvrez les œuvres acquises lors des éditions précédentes.
2021
Red Film (2018) est le troisième volet d’une trilogie filmique, avec Soft Film (2016) et Rose Gold (2017), qui questionne comment le désir se manifeste à travers les objets. Portant sur l’économie contemporaine du choix infini et les chaînes de production de la beauté et de la valeur, cette œuvre s’intéresse plus spécifiquement au sujet de la couleur. Elle pose un regard lucide et critique sur les manières dont cette couleur opère politiquement, socialement et historiquement, en particulier en regard de notre définition de la beauté. Les références à la couleur omniprésentes tissent des liens autant avec des objets de consommation, des œuvres d’art, qu’avec le concept de capitalisme au sens large. Une voix masculine ainsi que celle de l’artiste structurent la narration, en se référant aux écrits de personnages historiques et de penseurs critiques contemporains. Leurs observations sur la couleur s’enchaînent et se superposent alors que défile une constellation d’images qui réfèrent aux moyens par lesquels la couleur est utilisée pour réifier les constructions de genre, de race et de classe. Privilégiant un ton philosophique, Red Film critique la pression constante et persuasive du capitalisme en faveur de la conformité et de la consommation, et questionne l’utilisation du nom des artistes les plus célèbres de l’histoire de l’art moderne pour vendre des marchandises.
Dans Red Film, l’accumulation de signifiants, d’images et de citations colligées par l’artiste consolide la complexité de nos rapports au désir dans un monde opulent d’options et de choix, à acheter et à regarder. En incluant des reproductions d’œuvres d’art ainsi que de nombreuses références à des figures masculines de la modernité, dont Cézanne par exemple, force est d’admettre le fait que l’histoire de l’art occidental a participé à la construction de nombreuses valeurs marchandes, en utilisant œuvres et artistes à des fins publicitaires.
2019
Accumulant les revues et les livres illustrés dans son atelier depuis de nombreuses années, Janet Werner a constitué une vaste banque d’images reliées aux univers de la mode, du cinéma et de la culture populaire. Elle s’en inspire pour réaliser des tableaux dont les sujets majoritairement féminins défient les conventions classiques de la représentation. Depuis les années 1990, Janet Werner a développé un genre unique de portrait fictif, utilisant des photographies trouvées qu’elle manipule selon la technique du cadavre exquis, découpant et réarrangeant les parties des figures avant de les transformer encore en peinture par diverses opérations stylistiques. En résultent des œuvres mettant en scène des états psychiques complexes ainsi qu’une approche de la beauté basée sur l’ambiguïté, dénotant une tendance à l’onirisme ainsi qu’un intérêt pour les notions de transformation, de perte et de désobéissance.
Née à Winnipeg en 1959, Janet Werner vit et travaille à Montréal. Diplômée d’une maîtrise en arts visuels à l’École d’art et d’architecture de l’Université Yale (1987), elle enseigne à l’Université Concordia depuis 1999 et expose activement sur la scène nationale et internationale. Elle est représentée par la Parisian Laundry (Montréal), Birch Contemporary (Toronto) et Anat Ebgi (Los Angeles). Le Musée d’art contemporain de Montréal présente cet automne une exposition de ses œuvres, un survol ciblé de la dernière décennie durant laquelle les références à l’humour et au carnavalesque se sont estompées au profit d’une approche intéressée davantage par le contexte de production de la peinture, représentant l’atelier comme lieu de travail où les sources photographiques et les tableaux eux-mêmes cohabitent. Beast est une œuvre marquante de la nouvelle production de Janet Werner. Elle convoque l’imagination, le pouvoir de projection et se démarque par sa force expressive et la qualité de sa réflexion sur le caractère iconique des images.
2018
Dans ses photographies de la série The Other Night Sky, Trevor Paglen cartographie et photographie les satellites de surveillance américains les plus secrets qui orbitent autour de la Terre. À l’aide d’un logiciel d’astronomie personnalisé et de données d’observation amateur, il modélise l’orbite d’un engin spatial particulier et peut prédire avec précision quand et où il apparaîtra dans le ciel nocturne. Il utilise ensuite un système de caméras à exposition guidée pour enregistrer le trajet du satellite. Cette trajectoire va souvent à l’encontre de l’orbite naturelle des étoiles, ce qui met en évidence sa présence artificielle dans le ciel. L’ironie finale est que, lorsque l’artiste photographie le satellite, il est engagé dans le même acte en sens inverse.
Au cours des dernières années, le statut des images s’est profondément transformé. La très grande majorité de celles-ci sont créées par des machines pour d’autres machines et existent sous la forme de données jamais destinées à être lues par des yeux humains. L’œuvre INTRUDER 5A in Cygnus (Ocean Reconnaissance Satellite; USA 160) Note: Other Satellites Are SCOUT X-4 Rocket Body and Unknown) explore cette situation contemporaine et soulève des questions sur les implications de cette transformation.
2017
Skawennati est née dans le territoire mohawk de Kahnawake en 1969. Préoccupée par l’absence des peuples autochtones dans notre imaginaire collectif du futur, cette artiste mohawk se sert des arts médiatiques pour créer une présence autochtone dans le cyberespace. Le travail de Skawennati est surtout connu grâce à ses « machinimas », des films réalisés dans des environnements virtuels, où l’artiste chorégraphie les actions d’avatars dont la voix est fournie par des gens de sa communauté. Ses représentations « futuristiques » d’Autochtones permettent de pourfendre les stéréotypes véhiculés par les médias et d’affirmer la vibrance d’une culture autochtone actuelle avec un long futur devant elle.
Présentée à la Biennale de Montréal 2014 au Musée d’art contemporain de Montréal, TimeTraveller, 2007-2014, est une réalisation centrée autour d’une série de neuf courts machinimas. On y suit l’histoire de Hunter, un jeune Mohawk du 22e siècle qui part en quête virtuelle, à travers des moments marquants de l’histoire autochtone, grâce à la technologie des lunettes TimeTraveller, et rencontre Karahkwenhawi, une jeune femme mohawk du présent. Onkweshòn:’a: Words Before All Else Part 1, 2017, est une autre œuvre machinima, où un avatar récite en anglais, français et kanien’kéha la première section du Ohen:ton Karihwatehkwen, soit des « mots de l’action de grâce », traditionnellement prononcés au début de tout rassemblement Haudenosaunee (« Iroquois »).