Dans le prolongement d’un cycle d’expositions réalisées à partir de la collection du Musée d’art contemporain de Montréal, le septième Colloque international Max et Iris Stern propose un retour ciblé sur ces comptes-rendus récents de l’histoire de l’abstraction et sur leur résonnance dans les pratiques artistiques actuelles.

Un peu plus d’un siècle après son « invention », l’abstraction demeure très présente dans les champs de l’histoire de l’art et de la production artistique, où elle continue de générer de nouvelles interprétations. Au cours des dernières années, plusieurs musées ont consacré d’importantes expositions à son histoire, qu’il s’agisse des formes canoniques du modernisme ou de ses diverses itérations pendant la période d’après-guerre. Cet intérêt historique pour l’abstraction s’est aussi étendu à des époques plus récentes, certaines institutions et galeries ayant proposé depuis peu une relecture de son développement dans l’art des trois dernières décennies. Un tel intérêt doit probablement être mis en relation avec sa visibilité croissante dans la culture contemporaine, phénomène qui amenait récemment un historien de l’art à qualifier notre époque de troisième « âge d’or » de l’abstraction. En contrepartie, plusieurs  publications et expositions ont également réactualisé diverses interprétations historiques de l’abstraction qui décrivaient cette dernière non pas comme une caractéristique exclusivement liée aux objets (et aux œuvres d’art en particulier), mais comme une donnée définitionnelle plus large de l’évolution problématique de la finance et de la technologie modernes.

Les conférenciers traiteront, entre autres sujets, de la question de la subjectivité et de la corporalité au sein de paradigmes modernistes de l’abstraction; de l’évolution de ces problématiques dans le contexte sociopolitique et économique d’après-guerre, notamment dans diverses pratiques fondées sur la matérialité et la performativité; ainsi que des rapports qui peuvent être dessinés entre ces phénomènes esthétiques et la progression historique du développement de l’industrie et du pouvoir biopolitique. Il sera également question de la mise en disponibilité et du retour périodique des idiomes de l’abstraction, à une époque où la critique tente notamment de renouveler les termes de sa réponse à la logique marchande de recyclage formel. De la réactualisation des stratégies esthétiques modernistes aux dispositifs contextuels liés à l’archive, la performativité, le processuel, la narrativité ou la fusion des fonctions d’artiste et de commissaire d’exposition, les participants évoqueront divers types d’interventions qui permettent d’envisager une conception renouvelée des modèles de l’abstraction.

La tenue du septième Colloque international Max et Iris Stern coïncidera avec le lancement de la publication La Questionde l’abstraction.


Conférenciers

ARMLEDER, John M.

John M Armleder est un artiste né à Genève en 1948. Il fonde le groupe Ecart en 1969 avec Patrick Lucchini et Claude Rychner puis, en 1973, la Galerie et les Éditions Ecart. Ses premières performances et vidéos s’inscrivent dans l’esprit du mouvement Fluxus. À partir des années 1980, ses œuvres emploient diverses combinaisons d’idiomes picturaux abstraits et de ready-mades, jouant du contexte et du dispositif de mise en exposition pour appuyer certains effets de distanciation et d’hétérogénéité. Le travail de John Armleder a fait l’objet d’expositions monographiques dans de nombreuses institutions, parmi lesquelles Le Magasin (Grenoble), le Mamco de Genève, le Contemporary Art Museum de Saint Louis, la South London Gallery (Londres), l’ICA de Philadelphie, le Kunstverein Hanover (Hanovre), la Tate Liverpool, le MoMA (New York), le Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris et la National Galerie de Berlin. À titre de commissaire d’exposition, il a présenté All of the Above au Palais de Tokyo (Paris) en 2013. John Armleder enseigne à la Hochschule für Bildende Kunst de Braunschweig (Allemagne) et à l’École Cantonale d’Art de Lausanne (Suisse). Il a été lauréat du Prix Meret Oppenheim en 2011.

BOIS, Yve-Alain

Yve-Alain Bois enseigne l’histoire de l’art à l’École des études en histoire au Princeton Institute for Advanced Study. Il a été professeur d’art moderne (Chaire Joseph Pulitzer, Jr) à la Harvard University (1991-2005). Spécialiste de l’art européen et américain du 20e siècle, Yve-Alain Bois est reconnu comme spécialiste de plusieurs artistes, allant d’Henri Matisse et Pablo Picasso à Piet Mondrian, Barnett Newman et Ellsworth Kelly. Il a été commissaire et co-commissaire de nombreuses expositions influentes, dont Piet Mondrian, A Retrospective (1994); L’informe, mode d’emploi (1996); Matisse and Picasso: A Gentle Rivalry (1999); et Picasso Harlequin 1917-1937 (2008). Parmi ses ouvrages, mentionnons Painting as Model (1990); Formless: A User’s Guide (avec Rosalind Krauss, 1997); Matisse and Picasso (1998); et Art Since 1900 (avec Benjamin Buchloh, Hal Foster et Rosalind Krauss, 2004). Bois travaille présentement à plusieurs projets à long terme, entre autres une étude consacrée aux tableaux de Barnett Newman, le catalogue raisonné des peintures et sculptures d’Ellsworth Kelly, de même qu’une recherche sur l’histoire moderne de la projection axonométrique. Yve-Alain Bois a été cofondateur de Macula (1976) et est directeur d’October depuis 1991.

GILLIGAN, Melanie

Artiste et auteur, Melanie Gilligan est née à Toronto en 1979. Elle incorpore différents médiums dans son travail artistique mais, depuis quelques années, elle s’est intéressée particulièrement à l’écriture et à la réalisation d’œuvres vidéo et de performances narratives dans desquelles elle étudie les glissements culturels, politiques et économiques de notre époque. Ses écrits sur l’art, la politique et la finance ont paru dans des magazines et des revues comme Artforum, Texte zur Kunst et Grey Room, et récemment dans des ouvrages comme Canvases and Careers Today (Sternberg Press) et Intangible Economies (Fillip). En 2008, elle a fait paraître Crisis in the Credit System, un mini-drame fictionnel en quatre parties sur la crise financière récente, créé spécifiquement pour être diffusé sur Internet. Ses dernières œuvres vidéo en série Popular Unrest et Self-Capital sont toutes deux des drames narratifs qui se penchent sur l’état de la politique dans la crise actuelle du capital. Des expositions monographiques de son travail ont été présentées au Kolnischer Kunstverein (Cologne), à la Chisenhale Gallery (Londres), à la Transmission Gallery (Glasgow), à VOX, centre de l’image contemporaine (Montréal), au Banff Centre, à la Presentation House Gallery (North Vancouver) et à la Justina M. Barnicke Gallery (Toronto) entre autres lieux. En 2009, Gilligan s’est mérité le Paul Hamlyn Award for Artists et, en 2010, le prix Present Future décerné par Illy.

MANSOOR, Jaleh

Jaleh Mansoor est professeur adjoint à la University of British Columbia. Elle est titulaire d’un doctorat de la Columbia University (2007) et a enseigné à la SUNY Purchase, au Barnard College, à la Columbia University et la Ohio University. Sa recherche sur la peinture dans le contexte de l’Italie sous le plan Marshall a mené à des enjeux liés à l’abstraction matérialiste. Les champs d’enseignement et de recherche de Mansoor incluent le modernisme, l’art européen et américain depuis 1945, la théorie marxiste, l’historiographie et les études curatoriales critiques. Elle est critique à la revue Artforum et collabore régulièrement à October, Texte Zur Kunst et The Journal of Aesthetics and Protest. Mansoor a écrit plusieurs études monographiques, entre autres sur le travail de Piero Manzoni, Ed Ruscha, Agnes Martin, Blinky Palermo et Mona Hatoum. Elle est co-directrice d’une anthologie d’essais sur les réflexions de Jacques Rancière sur la politique et l’esthétique, intitulé Communities of Sense: Rethinking Aesthetics and Politics (2010). Elle travaille présentement à deux projets : l’un aborde la violence formelle et procédurale dans l’œuvre d’Alberto Burri, de Lucio Fontana et de Piero Manzoni; l’autre se penche sur le problème du travail, de la valeur et de la « vie nue » dans les travaux de Santiago Sierra et de Claire Fontaine, entre autres pratiques contemporaines qui examinent les limites de l’être humain.

PERRET, MAI-Thu

Mai-Thu Perret est née à Genève en 1976. Elle détient une licence en littérature anglaise de l’université Cambridge et a complété l’Independent Study Program du Whitney Museum en 2003. Une importante partie de sa production artistique multidisciplinaire s’articule autour d’un projet intitulé The Crystal Frontier, basé sur une commune utopique de femmes établie dans le désert du Nouveau-Mexique. Au cours des dernières années, ses œuvres ont fait l’objet d’expositions monographiques dans de nombreuses institutions, parmi lesquelles Le Magasin (Grenoble), le Mamco de Genève, la Haus Konstruktiv (Zürich), le Ann Arbor University Museum of Art, l’Aspen Art Museum, le SFMOMA (San Francisco), The Kitchen (New York), la Kunst Halle de Saint-Gall, le Bonnefantenmuseum (Maastricht) et la Renaissance Society (Chicago). Mai-Thu Perret a également été co-commissaire de Vides. Une rétrospective, au Centre Pompidou à Paris et à la Kunsthalle de Berne. Mai-Thu Perret a également participé à ILLUMInazioni / ILLUMInations, la 54e Biennale de Venise (2011). Elle enseigne au Master en arts visuels de la HEAD (Haute École d’art et de design de Genève) depuis 2009 et a été récipiendaire de nombreux prix, dont le Prix Manor (2011) et le Zürich Art Prize (2011).

PEZOLET, Nicola

Nicola Pezolet est professeur adjoint d’histoire de l’architecture à la faculté des beaux-arts de l’Université Concordia. Ses projets de recherche actuels portent sur l’essor du discours sur la « synthèse des arts », d’abord en Europe, puis en Amérique latine et au Canada. Il détient un doctorat du programme « Histoire, théorie et critique de l’art et de l’architecture » du MIT (Cambridge), 2013. Sa thèse, sous la direction de Caroline Jones et Romy Golan, porte sur la reconstruction en France après la Seconde Guerre mondiale et l’intégration d’œuvres modernes à l’architecture. Il a été boursier sur CRSH et du FRQSC, ce qui lui a permis de faire un stage de recherche prolongé à Paris, dans les archives de la Fondation Le Corbusier, du Centre Georges Pompidou et de la Cité de l’Architecture. Il a déjà publié une partie de ses recherches, consacrées aux années formatrices de l’Internationale Situationniste, dans les revues américaines October et Grey Room. Cet automne, il enseigne à Concordia un séminaire sur l’architecture moderne et l’évolution de la notion d’« œuvre d’art totale » aux 19e et 20e siècles.

SCHIMMEL, Paul

Paul Schimmel est vice-président et associé de Hauser Wirth & Schimmel, la nouvelle galerie d’art contemporain international de Hauser & Wirth à Los Angeles; il a été conservateur en chef du Museum of Contemporary Art à Los Angeles (MOCA) de 1990 à 2012. Il a organisé des rétrospectives monographiques consacrées au travail de Chris Burden, de Willem De Kooning et de Robert Rauschenberg, de même que plusieurs expositions thématiques importantes, entre autres Helter Skelter: LA Art in the 1990s (1992); Out of Actions: Between Performance and the Object, 1949-1979 (1999); Under the Big Black Sun: California Art 1974-1981 (2011); et Destroy the Picture: Painting the Void, 1949-1962 (2012). Schimmel a reçu de nombreuses récompenses, dont deux de l’Association of Art Museum Curators (AAMC), six de l’International Association of Art Critics (AICA) ainsi que l’Award for Curatorial Excellence attribué par le Center for Curatorial Studies at Bard College (2001). Il a été panéliste pour le National Endowment for the Arts et a été nommé par le président Barack Obama pour faire partie du comité sur la préservation de la Maison-Blanche (2010-2012).